Conservatoire d'espaces naturels de Corse

patrimoine naturel et culturel de la Corse

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Découverte hydro-biologique de la rivière A Solenzara avec A. ORSINI

Sortie Découverte - Le 25/09/2011 - Lieu : A Solenzara

Quelques semaines après la rentrée des classes, ce fut également celle tout aussi traditionnelle des Amis du Parc, qui se retrouvèrent dans la localité emblématique de la Côte des Nacres : Solenzara.
La cité balnéaire, encore toute frémissante de sa saison estivale et représentée par son premier magistrat, monsieur Jean TOMA, accueillit trois bonnes douzaines d’adhérents dans la salle des fêtes, par une collation réconfortante, notamment pour ceux qui avaient plusieurs heures de route à leur actif.
Il se livra ensuite à un bref aperçu de sa ville, de son histoire, de son présent et des projets que la commune entend mener, tout particulièrement dans le secteur de la plaisance sur lequel la commune mise beaucoup pour devenir le portail d’entrée incontournable sur l’arrière pays.
Le maire nous expliqua que la genèse de Solenzara remonte au milieu du XIXème siècle, période durant laquelle le Comandant POLI fut en grande partie à l'origine du village en créant une usine puis deux hauts fourneaux sur l’embouchure du fleuve. Cet établissement produisit jusqu’à 6000 tonnes de fonte par an. Cette activité périclita puis disparut en 1880, mais la petite cité résista tant bien que mal à ce sinistre industriel, jusqu’à l’embellie de ces dernières décennies.
Suivant le maire, dans une promenade patrimoniale au cœur de sa cité, nous visitâmes les ruines de la fonderie installée sur un bras mort de la Solenzara où accostaient les navires chargés du minerai de la proche île d’Elbe. Plus loin, le maire nous indiqua l’ancien îlot situé dans l’embouchure et où se dressait la tour de Solenzara, érigée en 1552 et emportée par les crues du fleuve, comme ses consœurs du Travo et du Tavignano.
Nous nous dirigeâmes ensuite vers le port de plaisance que la commune a souhaité exemplaire quant aux normes environnementales. Toutes les eaux usées, qu’elles soient produites par les plaisanciers ou par les professionnels sont intégralement récupérées et recyclées. Ainsi, le bassin est désormais exempt de pollution et a retrouvé une faune marine que l’on croyait disparue.
Enfin, une visite de l’Office du Tourisme nous permit de découvrir le réseau Odyssea, système de présentation informatique des attraits de la ville et de la région, soit sur des écrans tactiles, soit sur des smart phones et qu’ont également adopté les cités d’Ajaccio, Calvi, Saint Florent, Maccinaggio et Bonifacio. Désormais, le touriste peut découvrir tout ce qui est notablement intéressant dans les domaines de la culture, du nautisme, de la nature des saveurs et de l’art de vivre dans un rayon d’une heure de route autour de la cité.
Il est manifeste que ces nouvelles technologies permettront un regain d’attrait pour le périmètre touristique de la Côte des Nacres.


Antoine ORSINI, hydrobiologiste à l’Université de Corse, nous accompagna pour l’après-midi, dans le cadre d’une intervention en deux temps :
Une première partie en salle, avec la présentation d’un superbe diaporama sur les eaux douces de Corse et par la suite, une découverte du milieu in situ, sur les berges de la Solenzara.
La première intervention d’Antoine se déclina en 4 points principaux :
* Les eaux souterraines ;
* Les eaux de surface ;
* Les milieux permanents : les eaux courantes et les eaux stagnantes ;
* Les milieux temporaires : les cours d’eau et les mares.
Il serait long et fastidieux de rappeler tous les sujets abordés, rappelons seulement quelques bribes de sa passionnante intervention :
Nous apprîmes notamment que les eaux souterraines peuvent circuler sous terre jusqu’à 15.000 ans avant que sourdre à l’air libre. Si sur le Continent, nous trouvons 69 espèces de poissons (19,dont 26 introduites), il en existe que 32 espèces (19,dont 20 introduites) sur les cours d’eau insulaires. Parmi ces espèces quatre sont protégées au niveau national, la blennie fluviale, le brochet, l’alose feinte et la truite. Au niveau des amphibiens, nous trouvons quatre espèces : le discoglosse corse, la reinette sarde, l’euprocte et la salamandre de Corse. Quant aux reptiles, nous pouvons rencontrer la cistude d’Europe, la tortue de Floride (19,que l’association suit depuis des années pour étudier sa redoutable expansion), la couleuvre aquatique et la couleuvre vipérine. Pour ce qui concerne les invertébrés, Antoine nous apprit que les larves d’insectes représentaient 80% des larves aquatiques. Enfin, une flore aquatique composée de bactéries, de champignons, de fougères compléta la magistrale démonstration largement illustrée de photographies et de graphiques pertinents.
Nous transportant à quelques kilomètres en amont de l’embouchure, sur la route du col de Bavella, Antoine nous entretint quelques instants sur les rives de ce superbe fleuve
Il insista sur le fait que la Solenzara est un fleuve modeste puisque son cours ne mesure que 22 km de long et son bassin versant est inférieur à 100 km². De même, son débit peut sembler ridicule puisque estimé à 2 m3/s en moyenne sur l’année. Pour autant, il connut dans un passé très proche des pics monstrueux ! Ainsi à la Toussaint 1993, on a enregistré des pics à 1.500 m3/s que l’on peut comparer sans rougir au débit moyen du Rhône de 1.700 m3/s ! C’est dire la difficulté pour les organismes qui y vivent de résister à pareil excès.
Il nous parla des menaces potentielles que peuvent connaîtrent les cours d’eau : les barrages, les rejets, l’agriculture, l’élevage, les exploitations agricoles, les granulats, les loisirs aquatiques, les changements climatiques et l’introduction d’espèces exogènes.
A vrai dire, pour ce cas d’espèce, il n’y aurait que les trois dernières d’entre elles qui présentent un danger. Souhaitons que la sur fréquentation estivale ne mette pas en péril cet équilibre des plus fragile.
C’est sur cette expectative que les Amis du Parc se dispersèrent au terme de cette captivante journée.