Conservatoire d'espaces naturels de Corse

patrimoine naturel et culturel de la Corse

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Nonza: Son Paysage, son réseau d'irrigation des restanques,

Sortie Découverte - Le 01/05/2011 - Lieu : Dans le Cap

Juché sur le Monte Stello, Eole intercéda grandement auprès de Jupiter pour qu’il détourne son courroux tenace de la péninsule septentrionale de l’île, du moins, le temps de la sortie des Amis du Parc.
Il semblerait que ses suppliques furent entendues et Hélios étendit ses rayons sur la tour de Nonza qui lors scintilla dans l’aurore printanière comme un phare vers lequel aurait pu se diriger la trirème d’Ulysse et ses compagnons.

Il s’agissait de découvrir le réseau d’irrigation, les bassins et les restanques de la Commune, sous l’éclairage avisé de Jean-Pierre GUILLET, érudit local et passionné par les vestiges de cette époque où le cédrat était intensivement cultivé, protégé du vent par des murs ou des haies pour éviter que les fruits ne soient abîmés par les épines des branches. Cette production, qui se trouva, durant la période de la Restauration à la première Guerre Mondiale, la première au monde, était essentiellement vouée à l’exportation pour alimenter l'industrie du fruit confit d'Italie et d'Europe du Nord.

La saignée de la Grande Guerre mit un terme, faute de bras devenus insuffisamment nombreux, à cet âge d’or des agrumes.
La Nature et l’oubli gommèrent les efforts inouïs d’aménagement de ces pentes abruptes, suspendues entre la montagne et la mer et désormais recouvertes d’une épaisse végétation qui non seulement masque ces merveilles, mais participe de surcroît à leur lent démantèlement.

C’est dans la salle de la confrérie Santa Croce, attenante à la superbe église Santa Ghjulia, que Jean-Pierre accueillit la cinquantaine d’Amis qui firent le voyage cap-corsin, un brin de muguet à la boutonnière.
Ce Nonzais d’adoption nous avoua avoir découvert le superbe complexe qu’il allait nous décrire, durant ses promenades bucoliques dans la campagne environnante et s’être immédiatement pris d’intérêt devant l’ampleur et la pertinence de ces ouvrages.

Un superbe diaporama richement illustré et ponctué de commentaires avisés, captiva une assistance, au plus au point attentive. Le réseau d’irrigation et les bassins de retenue furent largement décrits à l’aide de photos fort heureusement réalisées à une époque où une tentative de réhabilitation, menée par la Commune, livrait des perspectives que la végétation a hélas depuis totalement effacées.

Des trésors de patience, d’effort et d’ingéniosité permirent de concevoir un ensemble cohérent et fonctionnel, capable d’approvisionner en eau cette industrie gourmande des agrumes.
Ainsi, en 1865, lors de la création de la route reliant Nonza au nord du Cap, actuelle départementale 80, toute la circulation de l’eau dut être modifiée pour devenir souterraine sous l’emprise routière.
Cela ne semble que peu de choses, mais quand on y songe, on ne peut qu’être interpellé par le savoir-faire des exploitants, à adapter leur complexe productif à cette intrusion macadamisée.

S’ensuivit un déjeuner pris sur le parvis de la confrérie, à l’ombre exquise et protectrice de platanes centenaires.

L’après-midi, une visite in situ s’organisa à l’intention des adhérents. Pour des considérations de temps, de sécurité et d’intérêt, ce ne furent que quelques morceaux choisis qui s’offrirent à leur émerveillent : chemins pavés, escaliers de pierres sèches, murs et murets séculaires, bassins maçonnés, maisonnettes en déshérence, terrasses aménagées, canaux suspendus ou rampants comme d’interminables couleuvres pétrifiées, autant de témoignages de la maestria et de la maîtrise de la pierre, patiemment transmises de génération en génération et qui disparu à jamais dans les tranchées de la Marne.

Jean-Pierre nous avoua avoir pris l’attache de l’Office de l’Environnement de la Corse, afin qu’il puisse intervenir dans le cadre de ses missions de valorisation patrimoniale et notamment dans le cadre du R.E.P.S. : Réseau Européen de la Pierre Sèche, afin de remettre en état le sentier en aval de la route qui dessert les innombrables parcelles du site. Cela permettrait de proposer aux promeneurs un circuit sécurisé, présentant l’essentiel des activités de l’époque, au sein de l’écrin naturel constitué par cette conque schisteuse comprise entre le piémont du Cap et la mer.

Souhaitons que ce vœu soit réalisable, puisque de beaux esprit l‘ont désormais rendu réaliste.