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Traditionnellement, la sortie précédant la pause estivale se déroule non loin de Mare nostrum. Ainsi, citons pour les dernières années : la réserve de Scandola en 2009, les îles Lavezzi en 2006 ou l’étang de Diane en 2005. Celle du présent millésime s’inscrit dans la même thématique marine et revient, une fois encore, dans le cadre incomparable des bouches de Bonifacio.
Comme à chaque fois également, cette sortie est fort prisée par les adhérents et notamment par ceux qui n’ont jamais eu le privilège de côtoyer pareilles merveilles. C’est donc une vedette entière qui avait été affrétée par le Président pour la circonstance.
La sortie du goulet de Bonifacio et l’élargissement subit de l’horizon sont toujours spectaculaires et forts en émotions : en quelques secondes, le navigateur passe d’un environnement resserré et paisible entre deux murailles d’albâtre à une immense plaine marine toujours plus ou moins malmenée par les caprices de Neptune. Il faut croire que ce jour là, ce Dieu terrible modéra ses ardeurs et que de son trident il maintint à flot notre frêle esquif. Grâce lui soit rendue pour sa noble attention !
C’est au débarcadère de la Cala di U Ghiuncu que nous prîmes pied sur l’îlot Lavezzu, joyau de la Réserve Naturelle des Bouches de Bonifacio, accueillis par Jean-Louis Pieraggi, animateur du Parc Marin International et ses collaborateurs.
Sous sa conduite nous nous dirigeâmes vers le phare et ses annexes, seul lieu « civilisé » de l’île où les Amis du Parc purent trouver l’ombre réconfortante que la végétation rase n’autorise, en ces lieux, qu’aux lézards et gobe-mouches.
Le Président se livra alors à un rappel des évènements de ces dernières décennies qui ont jalonné l’histoire tourmentée de cet environnement exceptionnel : Aux XVIIIème puis XIXème siècles l’archipel subit quelques vicissitudes foncières sans conséquence pour son intégrité et c’est au milieu du siècle suivant que les premiers périls survinrent, au moment de l’achat de l’archipel dans un but uniquement touristique. Concomitamment, en 1969, Michel Leenhardt œuvre à la création du Parc Naturel Régional de Corse et pousse à la création de notre association. Pour autant, les projets d’aménagement avancent bon train sur Cavallo, favorisés par une bienveillance de l’Administration pour tout ce qui peut catalyser le développement de l’île. Parallèlement, les Amis du Parc en accord avec le PNRC instruisent un dossier de protection de l’archipel et obtiennent en 1974, un classement au titre des sites de l’archipel, hormis Cavallo et Camara Canto. Deux ans plus tard, l’association se voit confier, par le Secrétaire d’Etat à l’Environnement la réalisation d’une étude préliminaire au classement en Réserve Naturelle de l’archipel des Lavezzi (19,hormis Cavallo, déjà urbanisé).
En 1980, les Amis du Parc présentent le projet de Réserve Naturelle, incluant les étangs de Spérone et de Piantarella.
L’année suivante, se crée la Réserve Naturelle des Iles Cerbicale, sur la commune de Porto-Vecchio et en 1982, le classement en Réserve de l’archipel des îles Lavezzi et des fonds marins environnants est obtenu. Dans la foulée, les Amis du Parc et le PNRC créent avec les communes de Porto-Vecchio et Bonifacio, l’Association pour la Gestion des Réserves des Cerbicale et des Iles Lavezzi, qui gérera cette zone jusqu’en 1995, date du lancement du projet de Parc Marin International. Enfin, en 1999 la Réserve Naturelle des Bouches de Bonifacio (19,partie française du Parc Marin International) est créée et gérée par l’Office de l’Environnement de la Corse.
Le Président s’est plu à rappeler le rôle primordial joué par l’association des Amis du Parc dans l’avancée notable et pérenne de la protection de cet environnement d’exception.
Cédant la parole à Jean-Louis Pieraggi, ce dernier nous entretint avant tout sur son rôle de surveillance, de conseil et de protection de l’archipel en particulier mais également de l’immense zone qui va des îles Cerbicale à celle des Moines, au large de Roccapina.
Le périmètre de la Réserve s’étend sur 80.000 ha dans lesquels la pêche sous marine est très réglementée quant à la nature, à la taille et au nombre de prises. Par ailleurs, dans une zone de protection renforcée de 12.000 ha, la chasse à terre et la pêche sous-marine sont interdites mais la pêche professionnelle autorisée, les débarquements et la déambulation soumis à des règles sévères. Enfin, il existe une zone de non prélèvement de 1.200 ha dans laquelle toute forme de pêche ou de plongée sous-marines sont interdites.
Jean-Louis insista sur la bonne entente avec les professionnels de la mer, sans laquelle rien ne pourrait avancer. Il mis en avant notamment la bonne volonté affichée par ces derniers quant au rapatriement des déchets collectés, sans compter les indispensables opérations de nettoyage d’avant saison.
Camille, une de ses collaboratrices, prolongea ces propos en abordant la problématique de la pêche au mérou et de la fréquentation estivale C’est une pointe journalière pouvant aller jusqu’à 4.000 personnes qui abordent l’île durant les mois d’été et une surveillance stricte des comportements visant notamment à empêcher l’accès aux zones non autorisées constitue la condition sine qua non du maintien de l’intégrité du milieu. De même, l’ancrage éventuel dans des zones à posidonies constitue une nuisance que les agents de la Réserve s’évertuent à empêcher par un balisage approprié. Depuis une vingtaine d’années également, ils accompagnent régulièrement les pêcheurs pour évaluer, grâce à leur prise, un état de la faune marine de la Réserve. Enfin, Camille nous signala un gage de bonne conduite des professionnels de la pêche qui ont augmenté la taille des mailles de leurs filets pour réduire la pression de capture sur le milieu.
Après toutes ces explications, un déjeuner à l’ombre de la terrasse permit aux adhérents de se requinquer, face à l’immensité turquoise des Bouches, sillonnées d’une myriade d’embarcations multicolores.
Après le déjeuner, deux groupes se formèrent pour entreprendre une visite de quelques singularités historiques, minérales, floristiques ou faunistiques de l’île. Sous la conduite de Camille et Jean-Louis, les colonnes s’ébranlèrent dans l’air surchauffé qu’une brise d’ouest peinait à tempérer.
Le circuit « classique » nous fit visiter la bergerie construite au XIX ème et qui désormais fait office de remise aux agents de la Réserve. Dans un cahot rocheux, les vestiges de l’ancienne chapelle Santa Maria du XII ème siècle, dont il demeure une belle partie semi troglodyte, l’abri sous roche datant du Néolithique et utilisé plus tard par des anachorètes, qui furent les premiers moines ermites à séjourner sur l’île. A quelques pas de là, le seul puits d’eau douce de l’île, l’ancienne carrière romaine qui exploitait les granites d’excellente facture de l’île, enfin un des deux cimetières où reposent les marins et officiers de la Sémillante.
Tout en cheminant, nos guides nous montrèrent diverses plantes symptomatiques de l’île comme le cinéraire maritime, l’arum peint, la giroflée à trois pointes, le scille maritime, la barbe de Jupiter, l’arum mange-mouches et la renouée maritime.
Une présence aviaire étonnante nous permit d’admirer des nuées de goélands leucophées, de cormorans, de gobe-mouches et même un faucon crécerelle en vol stationnaire.
En fin d’après-midi, l’embarquement des Amis du Parc se déroula cette fois-ci dans la Cala di U Grecu et un détour par l’île de Cavallo et son urbanisation, même si des efforts d’intégration ont été menés, nous permit de comprendre combien l’action de l’association a été salutaire dans la préservation du paradis à Robinson que nous venions de quitter.