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Une Balagne, encore nonchalamment alanguie dans un étirement quasi estival accueillit de son sourire coutumier une bonne cinquantaine d’adhérents, pour cette avant-dernière sortie de l’année.
Le programme de la journée se déclinait sur deux sites limitrophes à Lumio :
* En premier lieu, il était prévu une visite du GAEC ‘’L’Astratella’’ qui produit des huiles essentielles et des eaux florales dans le cadre d’une petite unité de distillation, dirigée avec passion par Noëlle et Batti Mariani, assistés de Milou Corteggiani.
Le fil rouge de la production passe par les jalons suivants : prise en compte de la spécificité de la flore insulaire, garantie d’une maîtrise totale dans la connaissance du cycle de la plante et de sa cueillette jusqu’à la transformation en huile essentielle, aboutissement jusqu’à la certification des espèces botaniques et labélisation biologique de l’huile essentielle.
Le processus de fabrication des huiles essentielles est assuré par une distillation lente, à la vapeur d’eau, de plantes fraîchement coupées (19,en règle générale du jour même) sur des sites naturels éloignés de toute pollution pour les 9/10 ème de la matière première, ou sur des sites de cultures biologiques pour le reste, tout en respectant un cahier des charges drastique.
Un laboratoire où mille fragrances subtiles se télescopent comme des comètes dans un ciel olfactif, nous fut donné à visiter.
Une cuve en cuivre de 1.200 litres avale goulûment les 350 à 400 kilogrammes de plantes fraîches qui, après une mise en pression d’environ 8 bars, donnent une vapeur qui entraîne l’essence contenue dans le végétal vers un serpentin réfrigérant où une condensation se produit.
A ce stade, par simple différence de densité, on recueille en surface l’huile essentielle, tandis que l’hydrolat aromatique plus lourd restera au fond du récipient.
Les utilisations de ces produits sont multiples, elles vont du massage pour des thérapies articulaires, circulatoires, respiratoires, tonifiantes, anti-inflammatoires, antalgiques, en franchissant la barrière cutanée. Elles s’administrent également par voie orale et agissent également sur la sphère hépatique, digestive ou O.R.L.
Le genévrier, le lentisque, le myrte, l’eucalyptus, le romarin, l’hélichryse, le petit grain de clémentine, les aiguilles de pin lariccio, le pistachier, entre autres, rentrent dans la composition des produits issus du GAEC ‘’L’Astratella’’.
Quand on sait qu’il faut une tonne de romarin pour produire in fine six litres d’huile essentielle, on comprend mieux le temps et la peine dispensés pour aboutir à ces précieuses fioles de distillat.
Une mise en route de la chaîne de production fit ronronner les monstres de cuivre et de verre d’où naquit le précieux nectar que beaucoup burent aussi avidement que s’ils furent sur la margelle de la fontaine de Jouvence. Nous verrons bien, lors de la prochaine sortie, si ces ingestions eurent les effets escomptés sur les adhérents !!!
Un déjeuner pris en commun dans les sous-bois du domaine ponctua cette entêtante et passionnante matinée.
* L’après-midi, nous nous rendîmes sur les hauteurs de Lumio, un site d’où l’œil ne peut que chavirer le temps d’un regard dans le bleu automnale de la Méditerranée, à la découverte du village préhistorique ‘’A Fuata’’. Monsieur Pierre Neuville, ancien officier en retraite désormais reconverti en archéologue passionné, nous attendait pour nous mener sur les fouilles qu’il mène sur les lieux depuis maintenant neuf ans.
Un oppidum rocheux, où seul un œil averti peut déceler des traces d’occupation humaine fut atteint après une petite marche dans le maquis balanin.
En premier lieu, monsieur Neuville nous fit effectuer une circonvolution oculaire sur la Balagne environnante. La région est grandement dotée de sites préhistoriques, nous distinguâmes notamment ceux de Spano (19,Néolithique ancien), du Monte d’Ortu (19,chaos rocheux occupé du Néolithique ancien à l’époque médiévale), de la Revellata (19,où l’on trouve des huttes des premiers pêcheurs), de la citadelle de Calvi (19,qui, avant de devenir la forteresse génoise que l’on connaît, abritait des hommes du Néolithique ancien), de Notre Dame de la Serra (19,occupée bien avant l’ère chrétienne), de Capu Porcarellu, de Capu Cardellu, de Capu Bracajo, de Capu d’Occi, de Capu Luna piana, autant d’empilements rocheux propices à des implantations humaines.
Le site plus particulier de la Fuata, datant de la période allant de la fin du Néolithique au début du Chalcolithique (19,soit vers 3.500 ans avant J.C.) a été découvert par notre guide en 1984 en collaboration avec Michel Claude Weiss. Mais les fouilles ne débutèrent qu’à partir de 1997. Au Néolithique terminal, les autochtones qui commencent à posséder quelques richesses et notamment des troupeaux d’animaux domestiques éprouvent le besoin de se positionner sur des hauteurs pour protéger au mieux leurs biens. Ce qui explique cette floraison de sites toujours perchés comme des nids d’aigles au dessus d’un monde impitoyable de prédateurs.
Le site représente une superficie d’environ un hectare et comporte treize terrasses d’implantation. Nous nous rendîmes sur l’une d’entre-elle pour apprendre que quatre couches distinctes se superposent, où l'on a retrouvé environ quarante-cinq mille tessons de céramique et mille fragments d’obsidienne. Sur un quadrilatère d’une dizaine de mètres, les fondations d’une hutte, qui comportait une charpente, sont encore visibles.
Rappelons que nous nous situons à un stade d’évolution où l’homme commence à fabriquer des outils en métal, tandis que la poterie atteint un stade très soigné et comporte désormais des décorations. Ce sont grâce à ces hommes, à leurs errements, leurs tâtonnements, leurs expériences, que nous sommes parvenus au stade d’évolution technologique où nous nous trouvons. Sans nul doute, le moindre objet que nous possédons dans nos poches aurait constitué, pour ces peuplades, un trésor aux pouvoirs surnaturels et nous remerciâmes monsieur Neuville de nous avoir rappelé cette leçon d’humilité.
A l’heure où l’astre du jour périclita comme depuis le début des temps sur le ponant carmin, nous nous séparâmes en songeant à nos ancêtres qui connurent le même spectacle, fascinés ou effrayés, il y a longtemps, longtemps, longtemps…