Conservatoire d'espaces naturels de Corse

patrimoine naturel et culturel de la Corse

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Journée du souvenir

Sortie Découverte - Le 24/06/2007 - Lieu : Dans le Campoloro

Cette dernière journée avant la pause estivale était dédiée à la mémoire de Dominique Mosca, membre fondateur, trésorier et vice-Président de notre Association, décédé l’an dernier.
La « capitale » du Campoloro émergeait comme la proue d’un vaisseau de schiste dans la brume matinale qui coiffait les hauteurs du Castello d’Osari, à l’heure les Amis du Parc se retrouvèrent devant le musée ethnographique, où les attendait Joseph Leoni, Président de l’ADECEC (19,Association pour le Développement des Etudes Archéologiques, Historiques, Linguistiques et Naturalistes du Centre-Est de la Corse)
Quel lieu plus chargé de la mémoire du disparu que ce superbe musée pour lequel il consacra trente années de son existence ?
Rappelons que le bâtiment est un ancien séminaire créé par Alexandre Sauli, dit l'apôtre de la Corse, érigé conformément aux directives du Concile de Trente en 1578 qui astreignait chaque diocèse à se doter d’un séminaire. Le futur saint oeuvra si bien que dès l’année suivante l’établissement accueillit 24 élèves.
Il servit ensuite de casernement à la garde de Théodore de Neuhoff, l’éphémère roi d’un été, qui s’aventura en Corse en l’an de grâce 1736 mais qui dut s’exiler suite à de multiples tribulations et mourut dans le dénuement loin de son « royaume » et de ses chers « sujets ».
Plus près de nous, la bâtisse fit office d’école primaire puis de cours complémentaire avant de connaître une ultime destinée en 1975, année où la commune la mit à la disposition de l’ADECEC.
Monsieur Leoni rappela que dès l’année suivante Dominique fut élu au Conseil d’Administration et entreprit dès lors sa grande œuvre d’enrichissement des collections.
Au fil des années, ce ne sont pas moins de quatorze salles d'exposition permanente qui furent aménagées au gré des dons, legs et prospections de Dominique à travers sa chère corse.
Visiter le musée c’est s’immerger dans les temps agrestes de l’île, où tout avait une utilité, tout s’enfantait à la sueur des peines quotidiennes et devenait pour lors précieux. Des milliers d’objets, mis en scène dans des décors rustiques rappellent les métiers d’autrefois qui s’exposent dans les diverses salles désormais trop petites pour présenter l’intégralité des collections : la tannerie; l'éclairage; la pharmacie; les vêtements; le filage et tissage; les araires; les serrures; la sellerie; la cordonnerie; la vie pastorale; les jouets; la fabrication des cierges; les poteries à l'amiante; l’art du vin; la forge; la menuiserie; l'imprimerie, constituent quelques thèmes rencontrés dans un vagabondage curieux au fil des étages et nul doute que ce matin là, l’ombre de Dominique planait, heureuse et sereine, au dessus de ses anciens amis.
A l’issue de la visite, la municipalité avait convié les Amis du Parc à un vin d’honneur où l’on rappela que l’intéressé, talentueux touche-à-tout, avait œuvré également dans une moisson d’imprécations « malédictives » en langue corse qui constitue sans conteste une véritable somme dans le genre. Ce recueil de ghjastemi, Dominique Mosca l’avait effectué en vue d’enrichir le corpus rassemblé par le moyen de la vidéo dans la série Parolle d’Eri. La lecture de quelques unes d’entres elles, ravit l’assistance par le côté sans conteste humoristique même au sein de l’invective ou du tragique.
Un déjeuner pris sous les ombrages qui jouxtent la chapelle Sainte Christine permit aux participants de recouvrer quelques forces avant que d’aller visiter cet édifice de style roman, tirant son originalité de ses deux absides décorées de fresques aux couleurs encore raffinées et datant du 15ème siècle. On y trouve notamment un Christ en Majesté entouré du Tétramorphe, huit saints et saintes (19,sainte Marguerite, saint Bernardin, saint Sébastien, saint Nicolas, saint Hippolyte, saint Sauveur, sainte Christine, saint Antoine). D’autres fresques, caresses de foi sur la peau des murs, montrent un Christ en Majesté entre une sainte et un moine agenouillé, les Apôtres, la Crucifixion, l'Annonciation, saint Christophe et l' Enfant Jésus, saint Michel et saint Jean.
Au terme de la visite, la procession des Amis du Parc se rendit au couvent Saint François de Cervione où les attendait monsieur Loriaut, facteur d’orgue et passionné de ces vieilles pierres, qui se livra à un bref historique du lieu. Il souligna qu’en 1506, le pape Jules II autorisa les Frères Mineurs de l'Observance à fonder un couvent, dédié à Saint François, dans la piève de Campulori. On prétend que le lieu de l’implantation aurait été décidé par un boeuf qui y conduisit la population. En 1584, Mgr Alexandre Sauli s'employa à restaurer l’édifice et plus tard, vers 1671, on procèda à des extensions pour que la bâtisse puisse recevoir douze religieux. Au début du 18 ème siècle il est sans conteste l'un des plus importants de Corse car il peut accueillir une quinzaine de religieux. Après 1729, le couvent va tenir un rôle important dans la révolte contre Gênes. A la révolution française, le couvent fut confisqué et affecté au génie militaire mais l'église attenante, qui comptait alors sept chapelles latérales fut conservée au culte. En 1816, le marquis de Rivière, commissaire extraordinaire du roi, céda le couvent à la commune de Cervioni. Cette cession fut certainement de courte durée car l'établissement resta propriété du ministère de la guerre et fit office parfois de caserne. En 1861, le couvent servit de refuge d'été et d'infirmerie au pénitencier de Casabianda. En 1914-1918, il reçut des prisonniers de guerre. En 1939, après avoir abrité le 7ème R.T.M., il servit de centre mobilisateur. Enfin, après la guerre, il devint la propriété de l’association de Saint-Vincent de Paul de Bastia qui l'utilisa pour ses œuvres de jeunesse, avant de le revendre une quarantaine d'année plus tard à la commune de Cervioni
Il est actuellement en cours de restauration par la Communauté de communes de Costa Verde qui entend lui donner une vocation culturelle et associative.
Une visite de ces lieux chargés de la mémoire des siècles, où désormais la tradition épouse la modernité dans des noces patrimoniales, augure d’une radieuse destinée.
Ce trait d’union entre le passé et l’avenir nous conduisit à Moriani où nous étions conviés par Marc Nicolaï, directeur de la Communauté de communes à un exposé sur l’action de cette collectivité au sein de la Costa Verde.
Fruit de l’action entreprenante de Marc Olivesi, son regretté Président, ce regroupement s’étend du pont de Folelli à San Giuliano et regroupe quatorze communes dans un bassin de neuf mille habitants. Créé il y a sept ans sur un territoire peu organisé, il a mené des actions d’investissements structurants et de développement économique visant à faire croître les activités et donc l’emploi sur le territoire. Ainsi, des projets ambitieux dans les domaines sportifs, patrimoniaux et touristiques virent le jour, injectant plus de sept millions d’euros dans l’économie locale. Depuis 2006, l’action est plus particulièrement orientée dans les services à la population : eau, assainissement, urbanisme, gestion des déchets.
Aujourd’hui, la Communauté de communes entreprend une harmonisation d’actions avec les bassins de vie limitrophes de la Castagniccia et de la Casinca.
Nul doute qu’avec un office du tourisme dynamique, une participation active des socioprofessionnels et des membres de la société civile aux prises de décision, le développement équilibré et consensuel de la Costa Verde perdurera dans son cercle vertueux.
Les Amis du Parc se saluèrent en se donnant rendez-vous le 30 septembre à Ghisoni, pour évoquer la politique forestière.